Dégradation des forêts dans le monde : voici son estimation, la plus précise en 30 ans

Par Loïc Chauveau le 11.03.2021

Ce 12 mars 2021 se déroule en ligne une journée de débats sur les moyens de restaurer les forêts dans le monde. Cette même semaine, une étude internationale révèle l’ampleur de la dégradation des forêts tropicales ces trente dernières années avec une précision inégalée.

TRILLIONS. L’homme continue de détruire les forêts de la planète alors qu’elles lui rendent une infinité de services et lui sont indispensables pour son bien-être et sa survie. C’est le message du Global Forest Summit qui se déroule toute la journée du 12 mars à Paris et que l’on peut suivre en direct sur ce site. Co- organisée par l’ONG ReforestAction et par l’Institut Open Diplomacy, cette manifestation veut établir l’état des lieux de la déforestation dans le monde pour mieux mettre en exergue les services cruciaux menacés : puits de carbone permettant de lutter contre le réchauffement climatique, dépollution, atténuation des tempêtes et des inondations, fourniture de molécules d’intérêt pharmaceutique, fruits et bois.

 

Le programme s’articule donc autour de l’apport des forêts en matière de santé humaine, de biodiversité, de climat et d’économie. Ainsi, affirment les organisateurs, la valeur intrinsèque que l’on peut retirer des forêts préservées dans le monde est de 125 trillions (milliards de milliards) d’euros. 45 millions de petites et moyennes entreprises vivent des produits de la forêt. Le message est clair : déforester pour exploiter les sols pour l’agriculture et l’élevage est un mauvais calcul économique autant qu’écologique.

la surface de l’Irlande détruite tous les ans

DEGRADATION. Mais quelle est l’ampleur réelle du recul des forêts ? Une équipe réunissant des chercheurs du Centre commun de recherche européen, du Cirad, du Center for International Forestry Research (CIFOR) et de l’INPE, le centre d’imagerie spatiale du Brésil, ont compilé toutes les observations satellitaires depuis 1990. Leurs travaux viennent d’être publiés dans Sciences Advances. La précision à 30 mètres de ces images – accessibles sur ce site – donne une idée précise des changements d’affectation des sols. Entre 1990 et 2019, la surface des forêts tropicales latino-américaines, africaines et asiatiques a

diminué de 17%, passant de 1290 à 1070 millions d’hectares. 220 millions d’hectares de milieux naturels sont passés à l’agriculture, l’élevage et d’autres usages. « Les données satellites nous montrent que, entre 1990 et 2020, ce sont environ 7 millions d’hectares de forêt tropicale humide qui ont disparu en moyenne chaque année. Cela équivaut environ à la taille de l’Irlande, tous les ans », précise Ghislain Vieilledent, écologue spécialiste des forêts tropicales et co-auteur de l’article dans le communiqué du Cirad.

surface occupée par la forêt tropicale

La surface terrestre actuellement occupée par la forêt tropicale. Copyright JRC/Cirad

 Arrêt total de la destruction des forêts d’ici 2030

La précision des images permet même de différencier les espaces déforestés totalement des zones dégradées, dernière étape avant la disparition totale du couvert arboré. 10% des 1070 millions d’hectares répertoriés sont ainsi en très mauvais état du fait de feux et de débuts de travaux de défrichage. Or, assurent les scientifiques, la moitié de ces milieux dégradés changent généralement d’usage. L’étude révèle également que cette tendance à la dégradation s’est accélérée entre 2015 et 2019 du fait de conditions climatiques très sèches provoquées par le phénomène El Nino sur l’Océan Pacifique équatorial. Autre constat : la situation en Afrique est plus grave qu’estimée auparavant. L’impact des cultures sur brûlis s’y révèle notamment plus important que dans les études précédentes.

Ces constats scientifiques nourrissent les réflexions au niveau mondial pour cesser la dégradation des forêts, les préserver réellement, voire favoriser leur extension. Le Global Forest Summit constitue une nouvelle étape de réflexion qui doit mener à la COP15 de la convention onusienne sur la biodiversité qui doit avoir lieu à Kunming en Chine dans la deuxième quinzaine de mai 2021. La communauté internationale doit y décider la protection réelle de 30% des surfaces terrestres et maritimes et l’arrêt total de la destruction des forêts d’ici 2030.

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